Dr Carine de Beaufort, médecin spécialiste en endocrinologie et diabétologie pédiatrique au CHL depuis 1987 est l’un des auteurs d’un article publié dans le magazine Nature Microbiology, l’une des publications de référence pour la recherche médicale. L’occasion de faire le point avec elle sur les différents axes de recherche actuellement menés par l’équipe du centre de diabétologie pédiatrique du CHL.
"L’endocrinologie, c’est la science de la médecine qui étudie les hormones, c’est- à-dire ces messagers qui transitent d’un endroit à l’autre de notre corps pour transmettre des informations. Il arrive parfois que notre corps ne produise pas assez d’hormones, comme par exemple pas assez d’insuline dans le cas du diabète de type 1. Parfois aussi, comme dans le cas du diabète de type 2, nous produisons assez d’hormones, mais elles n’arrivent pourtant pas à réguler le niveau de sucre dans le sang. Pourquoi ? C’est justement l’une des questions que je me suis toujours posées, et qui m’ont poussé à faire de la recherche, en plus de mes activités cliniques. Je me suis demandé non seulement comment on pouvait traiter le diabète de l’enfant, mais aussi quelles en sont les causes, pour mieux comprendre la maladie et, à terme, la prévenir peut-être.
Depuis des années, avec l’équipe du centre de diabétologie pédiatrique du CHL (DECCP), nous explorons trois directions de recherche :
- L’amélioration du traitement, par une évaluation constante de ce que nous faisons, pour les enfants diabétiques au Luxembourg.
- L’amélioration des technologies de traitement, par exemple en travaillant sur des pompes à insuline.
- La compréhension du diabète, ou ses causes.
Nous participons à plusieurs projets de recherche, la plupart du temps en collaboration avec d’autres institutions, soit en Europe, soit au Luxembourg. Dernièrement, nous avons eu l’opportunité rare de publier dans Nature Microbiology (1) les résultats de notre projet MUST (Diabete Multiplex Family Study), mené depuis 2011 en collaboration avec l’IBBL (Integrated BioBank Luxembourg) et le LCSB (Luxembourg Center for Systems Biomedicine, notamment Anna Buschart et Paul Wilmes). Avec ce projet, nous avons cherché à mieux comprendre le rôle du microbiome en analysant les selles de tous les membres de familles dont au moins deux avaient un diabète de type 1.
Deux points de notre travail ont été particulièrement reconnus : en premier lieu notre méthodologie, c’est à dire la manière dont nous avons analysé les selles. Nous les avons immédiatement congelées à -180 ou -80°C, ce qui a limité les « pertes » de bactéries qui peuvent se produire si les selles sont trop longtemps exposées à l’air. Nous avons ensuite non seulement pu analyser les bactéries et leur type mais aussi leur fonction. Cette analyse, le deuxième point important de notre travail, nous a permis de constater une modification des enzymes secrétées normalement par le pancréas exocrine chez les personnes atteintes de diabète. Elle nous a aussi permis de réaliser que la fonction des bactéries (et pas seulement le type, ie « taxa ») était différente selon les personnes de la famille avec un diabète. C’est une évolution dans notre compréhension de la maladie, une nouvelle piste à explorer pour mieux diagnostiquer et traiter les malades. Il est évident que ces résultats doivent être confirmés mais nous espérons que ceci nous aidera à mieux comprendre la patho-physiologie de la maladie ! "
(1) Integrated multi-omics of the human gut micro- biome in a case study of familial type 1 diabetes. Nat Microbiol. 2016 Oct 10;2:16180. doi: 10.1038/ nmicrobiol.2016.180.
Heintz-Buschart A, May P, Laczny CC, Lebrun LA, Bellora C, Krishna A, Wampach L, Schneider JG, Hogan A, de Beaufort C, Wilmes P.